Le chant des oiseaux

Le Soleil est haut dans le ciel. Les oiseaux chantent. Un doux son qui berce mes oreilles et m'apaise. Je crois que je n'ai encore jamais entendu de si jolies mélodies.

Une atmosphère d'été plane sur ce fabuleux endroit que l'on appelle les Collines de Maldoror. Ces ondulations de la Terre s'étendent devant moi, formant comme une mer d'herbe verte. On aurait presque envie de galoper à vive allure et de fermer les yeux, confiant, pour se sentir encore plus libre et vivant. Je suis persuadé que si je me mets à courir, je m'envolerais pour aller saisir les notes du chant des oiseaux...

Cependant, même si le coeur y est, je ne daigne pas faire un pas. Je reste immobile, serein, posant mon regard calme sur ce magnifique paysage. Un léger sourire illumine ma face. Mes yeux pétillent de bonheur. Si cela ne tenait qu'à moi, je  m'installerais définitivement ici. Mais j'ai encore plein de choses à découvrir dans ce nouveau monde.  

Pour le moment, je préfère profiter pleinement de cet instant. Je partirai à l'aventure plus tard. Peut-être demain, même. Je décide de m'étirer nonchalamment avant de m'étaler dans l'herbe et de lézarder au Soleil. C'est une si belle journée...

Que c'est bon de lézarder au Soleil ! J'avais presque oublié ce qu'étais une sieste ! Une douce sieste tranquille, dans un cadre merveilleux...

Chose étrange dans un lieu aussi calme, ma paresse ne pourra pas durer. En effet, alors que je suis sur le point d'oublier toute pensée, quelque chose me tombe dessus et perturbe mon repos. J'en suis si surpris que je pousse un grognement d'étonnement et ouvre de grands yeux. Sans plus attendre, je bondis sur mes quatre pattes. Il faut dire que je ne m'attendais pas à être déranger ainsi !

Je me retrouve alors face à face avec une boule de poils blanche. Une louve. Ses yeux sont d'une jolie couleur brune. Je la regarde de haut en bas.  

« D... Désolée, j'ai pas fait exprès, balbutie-t-elle. Je ne t'ai pas fait mal ? »

Je décroche un léger sourire en secouant la tête. En la regardant bien, je trouve qu'elle va parfaitement avec le paysage. Cela la rend plutôt charmante, et c'est sans compter sa maladresse qui lui donne un côté attendrissant. C'est ce genre de charisme qui me pousse à considérer un interlocuteur. Celle-là semble mériter mon respect. Enfin, je pense que je vais la tester un peu avant d'être sûr d'avoir affaire à quelqu'un qui n'est pas faible mentalement... Auquel cas, je sens que je vais bien m'amuser !

« Oh ! Plus de peur que de mal ! Je lance. Si encore tu avais été énorme, là j'aurais peut-être souffert, mais ce n'est pas le cas. »

Je m'ébroue, puis, je prends un air provocateur :

« Ah les filles ! Dès qu'il y a des fleurs, ça ne fait plus attention à rien ! »

" Comment ne pas être émerveillé par ce paysage ? réplique-t-elle. Le parterre ne vaut rien contre toutes ces couleurs à l'horizon. "

Je souris. Enfin quelqu'un qui a le sens de la beauté. Qui sait apprécier ce qui est vraiment beau. Je souris légèrement sans quitter la louve blanche des yeux. Bien qu'elle n'ait pas été spécialement méchante en me lançant ça, j'ai compris qu'elle serait prête à défendre un point de vue sans se laisser intimider par mes propos provoquants. C'est un bon point de garder son sang froid face à une tête à claque !

La demoiselle me passe devant et descend la colline sur laquelle nous nous trouvions. Après quelque mètres, elle se retourne et me demande mon nom. Je redresse les oreilles et regarde dans sa direction, surpris. Je pensais qu'elle voulait s'en aller et me planter là pour continuer son chemin tranquillement. Sans attendre, je trottine dans sa direction et m'arrête à ses côtés.

 " Moi, c'est Asko. Je suppose que ton nom est aussi beau que cet endroit. " 

Après quoi, je lui adresse un clin d'oeil. J'espère que ce petit compliment lui fera plaisir. Si ça se trouve, elle m'a pris pour un insensible qui ne sait pas voir la beauté des choses. Or, cela est totalement faux.

Il me sourit. C'est signe que ma réponse lui a plu. Je suis contente, je ne voulais pas qu'il la prenne mal. J’apprécie le loup face à moi, je ne le veux pas en ennemi, mais en ami. En quelques bonds, il se faufile près de moi. Je sens son odeur, sa douce odeur. Je l'aime bien ce loup.

" Moi c'est Amylia, mais appelle-moi Amy. "

Fort bien. Je tourne la tête pour regarder à nouveau le paysage. Je suppose qu'après ça nous allons aller le visiter tous les deux, ça nous occupera et nous pourrons sans doute bavarder. Je ne sais pas si cela fait longtemps qu'elle se balade dans le coin mais elle en sait peut-être plus, ce qui ne serait pas improbable. Si j'arrive à lui tirer deux ou trois informations utiles, cela me conviendrait parfaitement.

Je m'apprête à aller renifler à droite à gauche lorsque je suis stoppé net par la voix d'Amy. J'entends mon nom et le mot "proposition". Elle me demande alors si la vie en communauté m'intéresserait, ainsi que l'entraide. Je me retourne lentement vers elle et pose un regard interrogateur sur elle, tout en levant un sourcil, comme si j'essayais d'approfondir la question moi-même. Je ne sais pas si j'accepterais d'aider n'importe qui. Les inconnus, ce n'est même pas la peine d'y penser. Et lorsque ce sont des moins que rien, je préfère les regarder patauger dans leur malheur et en rire doucement. Je ne peux pas dire que je ne suis pas sociable, mais généralement, les autres sont niais et il y a plus de chochottes qu'on ne le pense. Je ne supporterais pas une vie dictée par la faiblesse des incapables.

 " Tout dépend de ce que tu entends par là. " je lâche, préférant ne pas répondre tant que je ne sais pas de quoi il s'agit.

J'ai déjà une petite idée de ce que va me demander la louve blanche que je viens tout juste de rencontrer. J'espère pour elle qu'elle vaut la peine et qu'elle mérite que je réfléchisse à ce qu'elle va me proposer.

" Non, ce n'est pas grave, laisse tomber, me dit-elle, tout en souriant. Excuse-moi, mais je vais devoir y aller. J'ai recueilli une louvette et elle doit avoir faim désormais. A une prochaine fois sans doute ! "

Sur ce, elle tourne les talons et s'en va, me laissant planté là. Je la regarde s'éloigner sans la quitter des yeux, jusqu'à ce qu'elle disparaisse derrière une colline. Etrange louve blanche... Elle m'a laissé sur ma faim, avec son histoire de proposition ! J'attendais qu'elle développe... Malgré tout, je dois avouer qu'elle est forte pour faire durer le suspens. Maintenant, nous serons obligés de nous revoir. Je suis bien trop curieux pour laisser passer cela sans même chercher à savoir où elle voulait en venir. Je veille à bien enregistrer toutes les informations qu'elle m'a laissé sur elle : sa face, sa démarche, son odeur. Je saurais la retrouver le moment venu. Et cette fois, je ne la laisserai pas s'en tirer aussi facilement.

J'affiche un sourire satisfait sur mon visage. Cette demoiselle, elle a le sens des responsabilités, et elle ne doit pas être du genre empotée, si elle se sent à la hauteur pour prendre soin d'une petite crotte de louvette. Après la première impression qu'elle ma laissée, je décide qu'à notre prochaine rencontre, je veillerai à bien faire attention à elle pour la connaître davantage.

Pris d'un élan de paresse, je me vautre dans l'herbe après avoir chercher un endroit moelleux et confortable. Le chant des oiseaux me berce et je me laisse emporter par sa douce mélodie...

∞ Fin ∞