No need to say Goodbye...

Je suis trempé. J'arrive sur un petit banc de sable chaud et blanc et je m'ébroue, épuisé par la traversé que je viens de terminer. Peut-être aurais-je dû attendre la marée basse... Bien que la mer soit calme et que très peu agitée, les trente mètres que j'ai parcouru sans avoir pied m'ont fatigué. Je ne suis pas bien entraîné à ce genre d'exercice... Heureusement que j'ai eu l'intelligence de choisir un trajet court entre le continent et la petite île isolée, et que la mer commençait déjà à se retirer.

Il me semble que j'ai atterris sur un petit coin de paradis. Tranquille. Reculé de tout. C'est un endroit idéal pour se reposer et méditer, je pense. En revanche, je devine tout de suite que ce ne doit pas être aussi reposant lors d'une tempête. Cette pensée me pousse à profiter de cette journée et de l'île tant qu'il fait beau. Ce n'est pas un caillou bien large, je devrais avoir fait le tour d'ici quatre ou cinq heure, le temps que la mer se retire. après, je m'en irai.

Sans attendre davantage, je m'avance vers la forêt qui borde la petite plage. Je me fraye un chemin entre les buisson et débouche très vite sur un sol sablonneux recouvert d'aiguilles  de pins. Parfois, je passe sur des rochers plats tapissés ça et là de mousse verte ou blanche. L'air marin et le vent embaument les lieux, le tout accompagné par le bruit des vagues.

Je ne tarde pas à tomber sur un beau sol vert recouvert d'herbe, où poussent par endroits de petites fleurs roses. J'en renifle une et souris, appréciant la senteur qu'elle dégage.

L'île Tahoe, cela fait un moment que je l'observe depuis le continent, mais là où elle est elle me paraît si loin, si inaccessible ... Mais depuis ce matin j’observe l'eau, elle monte et elle descend. Je dois y aller quand l'eau sera au plus bas, ainsi j'aurai beaucoup moins de nage à faire et ce sera plus facile, surtout pour une louve comme moi qui sait a peine nager ! Si je me débrouille bien, je n'aurais que quelques mètres à faire. De toute façon, cela sera mieux que deux kilomètres, c'est sûr.

J'observe attentivement les vagues, guettant le moindre signe de retirement. Et, au bout d'un assez long moment, le signe arrive. L'eau se retire enfin, je vais pouvoir passer. Je suis les vagues, j'attend le moment où elles seront au niveau le plus bas. Pour le moment, je trempe à peine mes pattes. L'eau est glaciale. Cela ne va pas être une partie de bonheur, mais ma curiosité domine tous mes autre sens.

Cy est, je n'ai jamais vue la mer aussi basse, je dois passer, c'est maintenant ou jamais. Je me mouille assez vite, l'eau rentre dans mes poils, me donnant quelques frissons, mais je commence la traversée ... qui ne dure pas plus de deux minutes. J'ai donc très bien choisis mon moment.

A peine arrivée sur la terre ferme que j'en profite pour m'ébrouer. C'est malin tiens, maintenant que le soleil commence à se coucher, j'ai froid. Il faut que je bouge pour me réchauffer et pour sécher l'eau . Je commence à trottiner, droit devant. Je ne sais pas où je suis, donc autant aller tout droit. Je me retrouve dans une sorte de forêt. Je continue de trottiner, je regarde les alentours. J'ai de moins en moins froid, mais j'ai toujours de l'eau sur moi.

Je heurte quelque chose, enfin ... quelqu'un plutôt. Je reconnais cette odeur. Ce loup je l'ai déjà rencontré, dans les même conditions ... Asko. Le pauvre ! A chacune de nos rencontres je vais lui tomber dessus !

▬ Asko ! Décidément nos rencontres ne sont pas des plus normal ! Je ne t'ai pas fais mal j'espère ?

Tandis que je suis en train de renifler une fleurs - chose qui me rend très peu viril, je dois l'admettre - quelque chose me tombe soudain dessus. Surpris, je fais un bon sur le côté et m'apprête à me défendre. En voyant la boule de poils blanche qui se tient en face de moi, je me radoucis immédiatement. Cette boule de poils, je la connais. Il n'y a nulle crainte à avoir. C'est Amy.

" Asko ! Décidément nos rencontres ne sont pas des plus normales ! Je ne t'ai pas fais mal j'espère ? "

Toujours aussi souriante que la dernière fois. Et toujours aussi maladroite ! Cette louve a du charme, je dois l'avouer. Je laisse échapper un rire et m'assois dans l'herbe, l'air détendu.

" Est-ce que j'ai l'air d'avoir mal ? " je lance en accompagnant ma question d'un clin d'oeil complice.

Je suis content de la revoir. En plus, le cadre est toujours aussi sympa que pendant notre première rencontre. Au moins, cette fois, elle ne pourra pas prendre la poudre d'escampette aussi facilement que la dernière fois. Avec la mer autour, difficile de partir avant la marrée basse. Je remarque justement qu'elle est encore trempée. Je devine qu'elle a dû nager, tout comme moi. A-t-elle froid, avec ce vent marin ? Cette idée me pousse à chercher quelque chose pour arranger ce petit problème. Je n'ai pas envie qu'elle attrape un rhume, la demoiselle ! Puis je suis mouillé aussi, de toutes façons. Je la regarde, me couche et commence à me rouler dans l'herbe avec énergie, tirant la langue.

" Essaye ! Tu vas voir, on sèche plus vite ! "

Je crois qu'il m'a repéré plus vite que je ne l'ai fait. C'est sûr que des louves qui tombent tout le temps on en voit pas tous les jours ! En tout cas, Asko ne m'a même pas décoché un regard noir ou autre, non, il m'a lancé un sourire lupin et cette phrase juste après avoir repris sa pause dans l'herbe verte.

▬ Est-ce que j'ai l'air d'avoir mal ?

Je lui décoche à mon tour un sourire lupin. Je sais très bien que cette phrase est une sorte de "Mais non tu ne m'as rien fait voyons !" et que je n'ai pas à y répondre.

Le vent marin est là. Avec mes poils encore humides je commence à avoir froid mais je m'en moque un peu. On aurait dit que ça fait une éternité que je n'ai pas vue Asko ! Alors je vais rester ici, avec lui, quitte à attraper un rhume !

Eest il fou ? Il commence à se rouler dans l'herbe vigoureusement ! Remarque, c'est peut être pour ça que je l'aime autant, il n'a pas peur du ridicule ... Essaye ! Tu vas voir, on sèche plus vite !

▬ Essaye ! Tu vas voir, on sèche plus vite !

... Tout comme moi ! Je commence à faire comme lui, me mettre sur le dos et balancer assez vite de droite à gauche. Il a raison n'empêche ! Ca sèche tout ça ! Nous faisons ça pendant un long moment. Quand je ne sens plus d'eau sur mon pelage je m'arrête et je reste couché sur l'herbe qui est maintenant mouillée.

Je regarde Asko. On dirait un gamin qui découvre l'herbe ! Il est mignon. Je souris. Ca fait plaisir de voir des loups comme ça, qui ont la joie de vivre.

▬ Tu as raison, maintenant je n'ai plus froid ! lui dis-je en souriant, encore une fois.